L’OSINT intrigue beaucoup de monde, mais lorsqu’il s’agit de cartographier un réseau social comme un groupe Telegram, un serveur Discord ou même un forum un peu obscur, beaucoup pensent qu’il faut sortir la carte bancaire pour accéder à des outils complexes et réservés à une élite. En réalité, ce n’est pas le cas. Avec un peu de méthode, de patience et quelques outils gratuits, vous pouvez déjà obtenir une vision claire de la structure d’un groupe, de ses membres et des interactions qui s’y construisent.
- Comprendre comment analyser en profondeur un groupe Telegram, Discord ou forum avec une méthode claire et accessible, même pour débuter.
- Savoir organiser ses observations pour révéler les rôles, les liens cachés et les dynamiques réelles d’un réseau social.
- Apprendre à créer une cartographie exploitable grâce à des outils gratuits afin de visualiser efficacement la structure d’une communauté en ligne.
Au fil de mes expériences, j’ai vu des débutants se débloquer simplement parce qu’ils comprenaient, pour la première fois, que l’OSINT n’est pas une affaire d’experts chevronnés mais plutôt une démarche logique, presque artisanale. Ce sentiment de pouvoir comprendre comment un réseau fonctionne et comment les gens y interagissent procure une vraie satisfaction, surtout lorsqu’on découvre que tout cela est accessible, sans dépenser un centime.
Dans ce chapitre très complet, vous allez apprendre à analyser en profondeur un réseau social, même un groupe fermé ou semi-privé, grâce à des techniques simples, réalisables depuis un ordinateur classique. Vous découvrirez comment collecter des données publiques, comment les organiser, comment visualiser les relations, et comment créer une cartographie claire qui vous aidera à comprendre un environnement numérique parfois opaque.
- Comprendre l’objectif réel d’une cartographie OSINT
- Les outils gratuits que vous allez utiliser
- Collecter les informations : la première étape essentielle
- Organiser les données collectées sans se perdre
- Construire progressivement votre cartographie
- Passer à la cartographie graphique avec des outils gratuits
- Exemple concret : cartographier un groupe Telegram public
- Exemple concret : analyser un serveur Discord très structuré
- Exemple concret : analyser un forum classique
- Éviter les erreurs classiques en OSINT sur les réseaux sociaux
- Approche avancée : enrichir votre cartographie avec des traces externes
Comprendre l’objectif réel d’une cartographie OSINT
Avant de se lancer dans les outils et les manipulations pratiques, il est essentiel de comprendre ce que signifie réellement “cartographier un réseau social” dans un contexte OSINT. Beaucoup imaginent immédiatement un schéma visuel complexe avec des noeuds et des arcs partout. Bien sûr, c’est une forme aboutie de cartographie, mais ce n’est pas le point de départ.
L’OSINT repose d’abord sur l’observation. Lorsque vous cartographiez un groupe Telegram, un serveur Discord ou un forum, vous cherchez à comprendre qui parle à qui, qui influence qui, quels sous-groupes existent, quels sujets dominent, quels comptes sont passifs et quels comptes jouent un rôle plus discret mais stratégique. Ce travail ressemble parfois à celui d’un archéologue : vous déterrez des fragments, vous les organisez, puis vous reconstruisez un ensemble cohérent.
Le but final est d’obtenir une vision d’ensemble, même si certaines zones vous échappent encore. En OSINT, vous n’obtiendrez jamais 100 % des informations, et ce n’est pas grave. Ce qui compte, c’est d’avoir suffisamment de données fiables pour mieux comprendre le fonctionnement du réseau.
Les bases indispensables avant toute recherche
Lorsque vous commencez un travail de cartographie OSINT, il faut accepter une chose : vous allez manipuler des informations fragmentées. Pour éviter les erreurs d’interprétation, il est nécessaire d’adopter dès le début une méthode rigoureuse. Cela commence par la définition de votre périmètre.
Sur Telegram, la structure peut être très différente selon qu’il s’agit d’un canal ouvert, d’un groupe public ou d’un groupe privé. Sur Discord, un serveur peut contenir plusieurs salons séparés, avec des niveaux d’autorisation différents. Un forum, quant à lui, peut être totalement ouvert ou nécessiter une inscription obligatoire. Chaque type de réseau possède ses spécificités et vous devrez les prendre en compte pour éviter d’aller dans la mauvaise direction.
Définir votre périmètre signifie répondre à quelques questions simples, mais essentielles :
- Qui participe à ce groupe ?
- Quels sujets semblent importants ?
- Quelles zones du réseau sont accessibles publiquement ?
- Quelles actions sont nécessaires pour accéder aux zones non visibles immédiatement ?
Ces éléments vont guider votre exploration et vous éviter de vous disperser. En OSINT, la dispersion est le principal ennemi : on veut tout voir, tout analyser, alors qu’il vaut mieux avancer méthodiquement.
Les outils gratuits que vous allez utiliser
Beaucoup de débutants pensent que l’OSINT repose sur des plateformes payantes très sophistiquées. En réalité, l’essentiel du travail peut être réalisé avec des outils gratuits. Ce qui compte n’est pas l’outil en lui-même mais la façon dont vous l’utilisez.
Les principaux outils qui vous seront utiles dans cet article sont :
- Votre navigateur web.
Cela semble évident, mais la majorité du travail d’observation se fait directement depuis un navigateur. Certaines extensions gratuites comme “Wappalyzer”, “View Page Source” amélioré ou “User-Agent Switcher” peuvent également vous aider à mieux comprendre la structure d’un site. - Telegram Web et Discord Web.
Les versions web de ces applications permettent souvent une observation plus confortable, notamment pour inspecter le code, analyser les flux en direct et capturer les informations textuelles. - Whois et outils d’empreinte numérique.
Pour un forum, il est souvent utile de connaître le domaine, l’hébergement, les technologies utilisées. Des outils comme “who.is”, “dnschecker.org” ou “BuiltWith” sont totalement gratuits. - Les outils de capture et d’archivage.
Des plateformes comme “Archive.org”, “Archive.today” ou des extensions telles que “SingleFile” permettent de figer une page au moment où vous la consultez. C’est très utile, surtout si le groupe ou le message disparaît plus tard. - Les outils de cartographie gratuits.
Des logiciels comme “Gephi”, “Kumu” ou même “draw.io” peuvent vous aider à représenter vos données visuellement. Ce ne sont pas des outils OSINT à proprement parler, mais ils vous permettront de créer les schémas dont vous aurez besoin pour visualiser votre réseau social. - Un simple tableur.
Qu’il s’agisse de LibreOffice, Google Sheets ou Excel, un tableur vous aidera à organiser vos informations. La cartographie commence sur un tableau, jamais directement sur un graphique.
Ces outils sont totalement gratuits, accessibles à tous et largement suffisants pour faire une cartographie OSINT solide.
Collecter les informations : la première étape essentielle
La collecte d’informations est la phase la plus longue, et parfois la plus laborieuse. C’est normal, car vous allez reconstruire un puzzle. Lorsque vous entrez dans un groupe Telegram ou un serveur Discord, vous devez observer avant d’agir. Ce réflexe est essentiel en OSINT, car une participation trop rapide peut biaiser vos résultats. Vous pourriez influencer les discussions ou donner l’impression que des activités se développent parce que vous intervenez.
Il vaut mieux rester silencieux. Écoutez. Regardez. Analysez.
Sur Telegram, cela signifie surveiller qui publie, à quelle fréquence, quelles réactions ces messages génèrent, quels comptes semblent influencer le groupe.
Sur Discord, cela implique d’observer les rôles attribués à chaque membre, les salons actifs, ceux où les échanges sont plus confidentiels, voire ceux qui semblent dormants mais qui pourraient se réveiller à tout moment.
Sur un forum, vous devez vous intéresser aux membres les plus actifs, aux modérateurs, aux règles d’inscription, et à la manière dont les anciens sujets sont organisés.
Lors d’une enquête menée sur un forum spécialisé dans les jeux vidéo, j’ai découvert que le véritable centre de décision n’était pas le forum principal mais un petit sous-forum caché, créé plusieurs années plus tôt. Les membres influents s’y retrouvaient sans que la majorité des inscrits n’en aient conscience. C’est une situation assez courante : la vraie activité n’est pas toujours là où l’on croit.
Ce type de découverte repose uniquement sur une observation attentive et patiente.
Organiser les données collectées sans se perdre
Une fois vos premières observations réalisées, vous allez vite vous retrouver avec une grande quantité d’informations éparses. C’est le moment où beaucoup de débutants OSINT se laissent submerger. Non pas par la difficulté technique, mais parce qu’ils ne savent plus quoi faire de toutes ces données. L’organisation n’est pas glamour, mais elle évite les erreurs et les interprétations hasardeuses.
La clé est de centraliser votre collecte dans un seul endroit. Un tableur est parfait pour cela, car il vous permet de structurer l’information progressivement. Au début, vous allez vous contenter de colonnes très simples, par exemple le nom du compte, la date de création du message, le rôle du membre sur Discord, le nombre de publications, ou encore le type de contenu partagé.
Puis, au fil de votre progression, vous pourrez affiner ces catégories. Par exemple, vous pourriez ajouter une colonne “lien avec d’autres comptes”, même si vous ne connaissez pas encore ces liens, ou encore une colonne “niveau d’activité estimé” basée sur ce que vous observez. Cette approche progressive rend le travail moins intimidant et plus naturel.
Lorsque vous observez un groupe Telegram, notez systématiquement qui parle le plus, qui parle peu mais toujours à des moments clés, qui partage des liens externes et qui réagit aux messages des autres. Sur Discord, notez les rôles, les accès aux salons, les permissions particulières qui peuvent en dire long sur la hiérarchie réelle du serveur. Sur un forum, concentrez-vous sur les anciens membres, ceux qui publient depuis des années : leur ancienneté vous donne souvent des indices sur leur influence.
L’objectif de cette phase est simple : transformer ce qui ressemble à un chaos d’informations en un tableau propre, lisible et enrichi au fur et à mesure. Vous ne faites pas encore de cartographie graphique, mais vous préparez tout ce qu’il faut pour la construire plus tard.
Trouver les connexions invisibles
Après l’organisation des données, vient le moment de chercher les liens, même ceux qui ne sautent pas aux yeux au début. C’est ici que l’OSINT se distingue du simple “parcours” d’un groupe. Vous commencez à tisser des relations. Parfois minimes, parfois évidentes, et parfois surprenantes.
Dans un groupe Telegram, les liens invisibles peuvent se révéler dans les réactions répétées entre deux comptes, dans les échanges privés évoqués publiquement, ou dans les redirections vers d’autres groupes ou chaînes. Certains membres sont très discrets mais apparaissent régulièrement lorsqu’un sujet spécifique revient. Ce sont souvent eux qui possèdent une expertise particulière.
Sur Discord, les rôles révèlent beaucoup de choses. Un membre peut ne jamais parler dans le canal général, mais avoir accès à un salon d’archives internes, ou disposer d’un rôle personnalisé créé uniquement pour une poignée de personnes. Ce rôle, même silencieux, représente un lien direct avec l’équipe d’administration du serveur.
Sur un forum, les liens apparaissent dans les citations entre membres, dans les anciennes discussions, dans les messages privés évoqués publiquement, ou encore dans les habitudes d’écriture qu’on repère en lisant attentivement les échanges. Parfois, un modérateur n’a pas besoin d’intervenir pour être influent : sa simple présence dans la liste des connectés suffit à calmer certaines conversations.
Trouver ces liens invisibles demande du temps. Certains jours, vous aurez l’impression de ne rien découvrir. C’est normal. L’OSINT est une discipline qui alterne longues périodes d’attente et moments où tout s’accélère d’un coup, parce qu’un détail vient soudain éclairer l’ensemble.
Repérer les hiérarchies et les sous-groupes
Dans tout réseau social, il existe toujours une hiérarchie. Elle peut être visible ou totalement implicite. Votre rôle, ici, est de la déceler.
Sur Telegram, la hiérarchie visible est simple : l’administrateur, les modérateurs éventuels, puis les membres. Mais derrière cette structure apparente, il existe parfois des micro-groupes qui fonctionnent comme des cercles informels. Par exemple, trois ou quatre membres très actifs qui se répondent systématiquement entre eux. Ces cercles ne sont pas toujours hostiles ou secrets. Souvent, il s’agit simplement d’amitiés ou d’habitudes. Mais dans une cartographie OSINT, ce type de lien compte énormément.
Sur Discord, la hiérarchie est souvent plus structurée grâce aux rôles. Vous verrez parfois des rôles très visibles comme “Admin” ou “Modérateur”, mais aussi des rôles camouflés, aux noms étrange-ment innocents. Certains serveurs créent des rôles temporaires pour des périodes précises, par exemple lors d’événements internes. Un rôle temporaire peut indiquer qu’un membre a eu un accès particulier à un moment donné.
Sur un forum, la hiérarchie peut être très discrète. Elle repose parfois sur l’ancienneté, le nombre de messages, la réputation, ou encore la relation implicite entre certains membres. Dans les forums les plus anciens, certains comptes ressemblent presque à des légendes locales : les anciens les connaissent, les nouveaux les respectent, et l’équipe de modération ne les contredit jamais publiquement.
La hiérarchie est essentielle dans une cartographie OSINT, car elle indique qui influence réellement le réseau. Sans cette information, la cartographie serait plate, incomplète, et incapable de raconter ce qui se passe dans le groupe.
Étudier le vocabulaire et les habitudes du groupe
Lorsque vous analysez un réseau social, vous ne travaillez pas uniquement sur des chiffres. Le langage utilisé par les membres est une source d’information incroyable. Les expressions récurrentes, les blagues internes, les surnoms ou même les erreurs grammaticales peuvent révéler des liens étonnants.
Sur Telegram, certains groupes utilisent des hashtags uniques pour organiser leurs discussions. Sur Discord, vous verrez des émoji personnalisés qui trahissent une culture interne, parfois très riche. Sur un forum, les anciennes discussions contiennent souvent les codes de communication du groupe.

Des formations informatique pour tous !
Débutant ou curieux ? Apprenez le développement web, le référencement, le webmarketing, la bureautique, à maîtriser vos appareils Apple et bien plus encore…
Formateur indépendant, professionnel du web depuis 2006, je vous accompagne pas à pas et en cours particulier, que vous soyez débutant ou que vous souhaitiez progresser. En visio, à votre rythme, et toujours avec pédagogie.
Découvrez mes formations Qui suis-je ?Étudier le vocabulaire n’est pas “optionnel”. Au contraire, c’est une étape indispensable, car elle vous aide à comprendre la dynamique relationnelle. Certains mots reviennent uniquement chez un groupe spécifique de membres. Certains sujets ne sont abordés que lorsqu’une personne précise est connectée. Ces détails vous aident énormément pour la suite.
Construire progressivement votre cartographie
À ce stade, vous avez des données, des liens, des indices de hiérarchie et une compréhension du langage interne du réseau. Vous pouvez commencer à construire une première version de votre cartographie.
Mais attention : la cartographie ne doit pas être parfaite dès le départ. Au contraire, elle se construit couche par couche, comme un croquis qui s’affine.
- Commencez par représenter les membres les plus actifs. Ils formeront le socle visible de votre réseau.
- Ajoutez ensuite les membres influents, même s’ils parlent rarement.
- Puis, reliez les comptes qui échangent entre eux régulièrement.
- Enfin, tracez les liens structurels : les rôles, les permissions, les historiques communs.
Cette approche graduelle vous évite d’être submergé et vous permet d’obtenir un schéma cohérent, exploitable et lisible.
Passer à la cartographie graphique avec des outils gratuits
Une fois votre base d’informations prête, vous allez pouvoir traduire ces données en représentation visuelle. C’est souvent l’étape que les débutants OSINT trouvent la plus impressionnante, parce qu’elle donne enfin forme à tout ce que vous avez observé jusque-là. Pourtant, la cartographie graphique n’a rien de magique. Elle se construit simplement, à partir de vos tableaux.
Le logiciel libre Gephi est l’un des meilleurs outils gratuits pour cela. Il peut paraître intimidant au premier lancement, mais son principe est simple : vous lui fournissez une liste de “nœuds” (vos membres) et une liste de “liens” (vos relations), et il vous aide à générer une visualisation. Si Gephi vous semble un peu lourd, vous pouvez également utiliser Kumu ou même draw.io, qui fonctionnent entièrement dans votre navigateur.
La méthode consiste à importer votre tableau ou à recréer manuellement les nœuds. Dans un premier temps, placez simplement les membres les plus actifs. Vous verrez rapidement apparaître une structure en étoile ou en petits clusters selon la dynamique du groupe. Ensuite, ajoutez les membres influents mais silencieux, en les connectant aux personnes avec qui ils semblent entretenir un lien. Le but n’est pas d’obtenir une carte parfaite, mais une représentation suffisamment claire pour comprendre les zones d’activité et les zones d’ombre.
Lorsque vous construisez cette carte, n’hésitez pas à repositionner manuellement les éléments. Un outil n’est jamais capable de deviner la logique humaine derrière un réseau. Vous, si. Vous connaissez l’histoire derrière chaque lien, les interactions observées, les tensions éventuelles. Votre intervention donne du sens à la carte.
Exemple concret : cartographier un groupe Telegram public
Prenons un cas simple : un groupe Telegram public qui rassemble environ mille membres autour d’un sujet donné, par exemple la cybersécurité.
Vous commencez par observer les conversations. Vous notez qu’une dizaine de comptes publient très régulièrement. Ces comptes deviennent vos nœuds principaux. Ensuite, vous repérez plusieurs membres qui ne publient pas souvent mais réagissent régulièrement aux publications de ces dix comptes. Vous ajoutez alors des liens de type “réaction fréquente”.
Puis, en observant les discussions sur quelques jours, vous remarquez que deux membres publient chaque fois à la même minute, comme s’ils coordonnaient leurs messages. Ils ne se répondent pas directement, mais leurs apparitions simultanées suggèrent une relation. Vous créez un lien entre eux, avec une annotation comme “synchronisation suspecte”.
Vous analysez aussi les liens externes partagés dans le groupe. Certains membres renvoient systématiquement vers un même site, ou un même canal Telegram parallèle. Chaque redirection constitue un lien vers un autre espace du réseau social que vous pouvez également intégrer à votre cartographie.
En quelques jours, votre carte contient déjà plusieurs zones :
- le noyau actif,
- la frange réactive,
- les membres satellites,
- et les liens externes vers d’autres canaux.
Vous commencez à voir le réseau, littéralement.
Exemple concret : analyser un serveur Discord très structuré
Discord possède une dynamique différente, car ses serveurs sont souvent mieux organisés que les groupes Telegram. Vous pourriez par exemple analyser un serveur lié à un jeu en ligne, avec des salons thématiques, un salon d’administration, et quelques salons plus confidentiels réservés à certains rôles.
Vous commencez par inspecter les rôles. Sur Discord, un rôle n’est jamais créé par hasard. S’il existe un rôle “Conseiller”, même si celui-ci semble décoratif, c’est qu’il a représenté une forme d’autorité à un moment donné. Un simple coup d’œil à la liste des permissions de ce rôle (lecture d’archives, accès à un salon caché, gestion d’événements, etc.) vous donne des informations cruciales sur la hiérarchie interne.
Ensuite, vous observez l’activité dans les salons publics. Vous notez quelles personnes interviennent le plus, lesquelles calment les tensions, lesquelles posent des questions, lesquelles redirigent systématiquement vers les règles du serveur. Ces comportements vous permettent de repérer les “modérateurs sociaux”, même s’ils n’ont pas le rôle officiel.
Vous examinez ensuite les salons semi-privés, quand ils sont accessibles. Certains salons d’équipes internes contiennent des discussions techniques. D’autres servent uniquement à coordonner des événements. Ces salons révèlent la structure interne du serveur.
Enfin, vous apprenez beaucoup en observant les horaires d’activité. Certains membres semblent être connectés en permanence. D’autres n’apparaissent qu’en soirée. Certains ne parlent jamais mais sont toujours en train de lire. En OSINT, ce type de comportement en dit parfois plus qu’un message écrit.
Votre cartographie finale sur Discord contiendra plus de strates que sur Telegram :
- les rôles officiels,
- les rôles implicites,
- les équipes internes,
- les membres influents,
- les réseaux de confiance,
- les membres passifs mais stratégiques.
Discord est un terrain idéal pour les débutants OSINT, car il expose clairement sa structure.
Exemple concret : analyser un forum classique
L’analyse d’un forum demande un peu plus de patience, car les discussions s’étalent souvent sur des mois, voire des années. Mais cette lenteur est un avantage : elle vous permet d’étudier l’évolution des relations au fil du temps.
Vous commencez par repérer les membres actifs actuels, mais aussi les anciens. Sur un forum, les anciens membres sont souvent ceux qui détiennent l’histoire du groupe. Ils ont vu les conflits, les anciens modérateurs, les migrations, les incidents techniques. Leur connaissance est précieuse.
Ensuite, vous analysez les sections du forum. Certaines sont publiques, d’autres nécessitent une inscription, d’autres encore sont en lecture seule pour les invités. Chaque niveau d’accès constitue une couche de votre cartographie.
Enfin, vous examinez la structure du forum lui-même. Certains forums utilisent des moteurs comme phpBB ou MyBB. Ce détail technique peut vous aider à déterminer la facilité d’accès à certaines pages, l’existence de flux RSS, ou la façon dont les anciens messages sont archivés. Ces détails vous donneront parfois accès à des données invisibles pour d’autres.
Votre cartographie forum affichera généralement :
- les membres influents,
- les anciens,
- les modérateurs,
- les administrateurs,
- les zones publiques et privées,
- les sujets sensibles,
- les archives profondes.
Éviter les erreurs classiques en OSINT sur les réseaux sociaux
Même si la cartographie OSINT est accessible, certaines erreurs reviennent souvent chez les débutants. L’une des plus courantes est de surinterpréter les données. Par exemple, deux membres qui se répondent souvent ne sont pas nécessairement amis, et deux comptes actifs à la même heure ne sont pas forcément liés. La prudence est une vertu en OSINT.
Une autre erreur est de vouloir aller trop vite. La collecte doit être lente et méthodique. Lorsque vous tentez de brûler les étapes, vous risquez de créer des liens artificiels ou d’oublier des informations importantes qui auraient changé toute votre compréhension du réseau.
Une troisième erreur est de négliger la sécurité. Même si vous n’utilisez que des outils gratuits, vous devez protéger votre identité numérique. Cela signifie utiliser un navigateur en navigation privée, éviter de rejoindre des groupes sous votre compte personnel, et ne pas interagir volontairement avec les membres du réseau social. S’observer discrètement est une règle d’or.
Approche avancée : enrichir votre cartographie avec des traces externes
Une fois que vous maîtrisez les bases, vous pouvez aller plus loin. Certains utilisateurs de réseaux sociaux laissent des traces en dehors du groupe que vous analysez. Par exemple, un membre Telegram peut utiliser le même pseudonyme sur un forum ou un réseau plus classique comme Twitter. Leur style d’écriture peut être similaire, leur fuseau horaire identifiable, leur domaine d’intérêt reconnaissable.
Croiser les informations n’est pas obligatoire, mais cela vous permet d’enrichir votre cartographie. Vous pouvez par exemple intégrer des profils externes, des pages web personnelles, des chaînes YouTube, des dépôts GitHub, ou des comptes de réseaux sociaux plus classiques. Cela donne une dimension supplémentaire à votre carte, et vous permet de comprendre la position du groupe dans l’écosystème global du web.
Bien entendu, cette pratique doit être menée avec beaucoup de prudence, car elle peut entraîner des interprétations erronées si elle est mal faite. Mais utilisée intelligemment, elle est extrêmement puissante.
Cartographier un réseau social avec des techniques OSINT gratuites n’a rien d’un travail réservé aux experts. C’est avant tout une démarche logique qui repose sur l’observation, la patience et une bonne dose de curiosité. En progressant étape par étape, vous construisez progressivement une vision claire d’un groupe, de ses dynamiques internes et des relations qui le composent.
Ce qui fait la force de l’OSINT, ce n’est pas la technologie, mais votre regard. Les outils gratuits vous donnent les moyens de matérialiser vos idées, mais c’est vous qui décidez quels liens font sens, quelles interactions sont importantes, et quels comportements méritent d’être représentés dans votre carte.
À mesure que vous pratiquerez, vous sentirez que votre intuition s’aiguise. Ce moment est très agréable : vous commencerez à percevoir les structures d’un réseau avant même de les dessiner. Et lorsque vous obtiendrez une cartographie cohérente, vous aurez l’impression d’avoir exploré un espace invisible que peu de gens savent lire ou comprendre.
Si vous continuez à développer vos compétences, vous pourrez appliquer ces méthodes sur des réseaux plus complexes, des communautés en ligne très actives, ou même des environnements numériques qui semblent opaques au premier abord. L’OSINT n’est pas une science figée, c’est un terrain d’exploration sans fin. Et désormais, vous avez toutes les bases pour progresser.

Fondateur de l’agence Créa-troyes, affiliée France Num
Intervenant en Freelance.
Contactez-moi
